Contre l’idée selon laquelle « Marine Le Pen ne se range pas à l’extrême droite » (dixit un Marcel Gauchet par exemple) car son parti ne rentrerait pas en contradiction avec les institutions démocratiques (contrairement aux ED historiques), Irène Pereira se propose de dégager d’autres critères pour reconnaître l’ED là où elle est, ici et maintenant.
Selon elle, « il existe un critère et un seul qui permet de définir les droites extrêmes et ce critère induit une continuité entre l’extrême-droite actuelle et l’extrême-droite historique ». Ce critère est celui d’un projet discriminatoire assaillant les droits des minorités. Or, pour mener ce projet, l’ED doit également mener une attaque contre les sciences sociales.
C’est ce qui conduit Pereira à analyser la « pédagogie publique mythifiante » de l’ED, qui construit un récit hostile aux sciences sociales en prétendant s’appuyer sur l’évidence du « sens commun » tout en pavant la voie pour des théories complotistes. Le danger étant que non seulement « cette attaque des sciences sociales n’est pas le fait uniquement des personnalités politiques d’extrême-droite [mais également] d’autres personnalités politiques classées à droite, au centre droit ou au centre gauche », mais qu’elle « n’atteint pas seulement une partie de la sphère politique, mais également de la sphère académique elle-même ». Pereira invite donc à se montrer vigilant.e.s vis-à-vis des registres de discours en jeu dans la bataille pour l’hégémonie culturelle.

Le songe de Tartini, 1924. Louis-Léopold Joilly, dessinateur & François Seraphin Delpech (Orléans, 1778 – 1825), imprimeur-lithographe